" Si vous ne pouvez pas vous occuper de vos enfants,
l'État s'en chargera. " La devise du régime de Ceausescu a envoyé des
milliers d'enfants dans des mouroirs. Marion était l'un d'eux.
1989. En pleine révolution roumaine, les télévisions du
monde entier révèlent la face la plus noire de l'univers concentrationnaire du
régime communiste de Nicolae Ceausescu. Un choc. Devant les caméras, des
enfants se balancent, hagards, derrière les barreaux de leurs lits crasseux.
Les plus malades sont aux portes de la mort.
Marion est née de cette dictature. Abandonnée par sa mère
alors qu'elle n'a pas encore un an, elle est placée dans un orphelinat de
Ceausescu. Car le dictateur interdit l'avortement, réprime la contraception et
force les naissances. Son but : peupler son pays au forceps d'une politique
nataliste redoutable dont la formule " Si vous ne pouvez pas vous occuper
de vos enfants, l'État s'en chargera " en dit long sur ses intentions.
Cette histoire est celle de Marion. Une quête d'identité,
une recherche de soi après une enfance amputée. Adoptée à l'âge de six ans par
un couple de Français, Marion n'a eu de cesse de retrouver ses parents
biologiques et de se reconstruire.
Commentaire:
En 1966, le Penseur du Danube ou le Génie des Carpathes –comprenez
Ceausescu- fait voter un décret 770 qui interdit l’avortement sauf dans des cas
extrêmes. Son obsession est d’obliger les femmes à avoir des enfants, 4 au moins : « la
population roumaine devra atteindre 25 millions en 1990 et 30 millions en 2000. »
Dans les faits, ce sera un fiasco mais en attendant quand une jeune fille se
retrouve enceinte et qu’elle ne peut subvenir aux besoins de l’enfant, elle
peut l’abandonner car « L’Etat se charge de tout ». C’est ainsi que
Maria née des amours illicites d’Ana et de Nicolae ; est abandonnée et
conduite dans un de ses orphelinats qui seront révélés plus tard après la chute
des Ceausescu. Les caméras montreront des images terribles d’enfants livrés à
eux-mêmes, grandissant sans soins, sans hygiène et surtout sans aucune
manifestation d’amour ou même d’empathie. La petite Maria a eu la chance
immense de pouvoir être adoptée par un couple de français qui est venue la
chercher en 1982. Sans eux, que serait-elle devenue ? D’autant que ce n’est
pas parce qu’elle a été adoptée que sa vie est devenue un long fleuve
tranquille. Comment se construire quand on n’a connu que l’abandon, l’indifférence
de femmes quand ce n’est pas leur colère et leur méchanceté ? Comment s’ouvrir
aux autres, aller à l’école quand on ne vous a jamais rien appris ? Il
faudra beaucoup d’amour de la part de ses parents, et beaucoup de force de sa
part pour permettre à Maria rebaptisée Marion de devenir une personne
équilibrée. Ce chemin personnel passera aussi par des voyages en Roumanie pour
percer le secret de sa naissance, retrouver et entendre celle qui l’a
abandonnée, faire sa connaissance ainsi que celle de son père. Au bout de ce
chemin, une certitude : venir en aide à tous ceux et celles qui ont connu
le même drame qu’elle.
Je remercie les
éditions Belfond et Netgalley de m’avoir fait découvrir ce témoignage terrible
d’une enfant broyée par un système politique effarant. En obligeant les
roumaines à multiplier les grossesses, Ceausescu rêvait à l’émergence d’un
nouvel homme communiste et donc d’une société neuve. Il a surtout contribué à
la dépopulation de son pays, à l’édification d’un système crapuleux puisque des
milliers d’enfants ont été vendus à l’étranger par ceux et celles qui étaient
censées s’occuper de ces enfants abandonnés. L’Etat s’occupe de tout… quelle ironie !
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