Pas de corps reconnaissable, pas d'empreintes, pas de
témoin. L'homme brûlé vif dans l'abri de jardin des Barlow est difficilement
identifiable. Pourtant la police parvient assez vite à une conclusion : il
s'agit d'un travailleur immigré estonien, Jaan Stepulov. Ils sont nombreux, à
Peterborough, ceux qui arrivent des pays de l'Est, et de plus loin encore, à la
recherche d'une vie meilleure. Et nombreux ceux qui voudraient s'en
débarrasser. Les deux policiers qui enquêtent sur le meurtre, Zigic et sa
partenaire Ferreira, ne l'ignorent pas. N'éliminant aucune piste, le duo
pénètre dans un monde parallèle à la périphérie de cette ville sinistrée par la
crise économique, là où les vies humaines ont moins de valeur que les matériaux
utilisés sur les chantiers de construction. Là où tous les chemins peuvent
mener au crime de haine.
Commentaire:
J’ai lu ce roman policier dans le cadre du Grand Prix des
Lectrices de Elle et je l’ai beaucoup apprécié. Parmi les 9 livres que j’ai été
amenée à lire cette année pour le prix, il est le roman policier qui se détache
nettement des huit autres. D’abord parce que l’auteur nous offre une intrigue
complexe mais bien ficelée. Quand les deux policiers commencent leur
investigation, ils pensent que le corps brûlé, retrouvé dans un abri de jardin est celui de Jaan Stepulov, immigré estonien,
qui avait quitté sa famille depuis quelques semaines pour retrouver son frère
Viktor, disparu après avoir lancé un appel à l’aide. Le fameux Viktor est
retrouvé ensuite ou plutôt ce qu’il en reste dans une morgue après avoir été
écrasé par un train. Mais cet accident cache un meurtre maquillé. Qui a tué les
frères Stepulov et pour quelles raisons ? L’enquête se tourne alors vers
un clan de gitans peu respectueux de la loi (doux euphémisme !) qui
exploite et terrorise de pauvres immigrés ayant atterri pour leur malheur entre
leurs mains.
Ce rebondissement met
en lumière un des atouts de ce roman : c’est la réalité socio-économique
de l’Angleterre en ce moment mais qui peut être la nôtre. Peterborough est une
ville anglaise située à l’est du pays et comme bon nombre des villes
européennes, elle souffre de difficultés économiques. Dans ce contexte
difficile, l’arrivée de ces flux de migrants venus de pays de l’Est et du Sud
de l’Europe dans l’espoir de démarrer une vie meilleure, cristallise toutes les
rancoeurs et les haines des habitants du coin qui voient en eux des voleurs d’emplois
alors qu’ils refuseraient de faire ces mêmes boulots mal payés. Dès lors que
des individus sans scrupules exploitent et maltraitent quelques migrants ne
dérange personne. Que ces mêmes migrants soient réduits à l’esclavage, tués
quand ils se rebellent, ne scandalisera qu’un temps l’opinion publique quand
elle sera mise au courant. Zigic et Ferreira qui mènent l’enquête et qui ont
connu eux aussi les regards méfiants des autres « parce qu’à prononcer leurs
noms est difficile » sont bien conscients que l’arrestation d’une poignée
de ceux qui exploitent le malheur de pauvres immigrés isolés, n’est que le haut
de l’iceberg. On sent beaucoup d’amertume dans ce roman policier et la nature
humaine est bien désespérante. Une auteure à découvrir de toute urgence.
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