mardi 14 avril 2020

La couleur des sentiments


Ségrégation, USA, domesticité, amitié, secrets...

Chez les Blancs de Jackson, Mississippi, ce sont les Noires qui font le ménage, la cuisine, et qui s’occupent des enfants. On est en 1962, les lois raciales font autorité. En quarante ans de service, Aibileen a appris à tenir sa langue. L’insolente Minny, sa meilleure amie, vient tout juste de se faire renvoyer. Si les choses s’enveniment, elle devra chercher du travail dans une autre ville. Peut-être même s’exiler dans un autre État, comme Constantine, qu’on n’a plus revue ici depuis que, pour des raisons inavouables, les Phelan l’ont congédiée.

Mais Skeeter, la fille des Phelan, n’est pas comme les autres. De retour à Jackson au terme de ses études, elle s’acharne à découvrir pourquoi Constantine, qui ‘la élevée avec amour pendant vingt-deux ans, est partie sans même lui laisser un mot.

Une jeune bourgeoise blanche et deux bonnes noires. Personne ne croirait à leur amitié; moins encore la toléreraient. Pourtant, poussées par une sourde envie de changer les choses, malgré la peur, elles vont unir leurs destins, et en grand secret écrire une histoire bouleversante.

Commentaire:

Après 820 ( !!)  commentaires sur Babelio à propos de ce roman, que dire de plus qui n’a déjà été dit ? Ce roman fait partie de mon top personnel si je devais partir sur une île déserte, je l’ai lu il y a quelques années. Et, j’ai eu envie soudainement de le relire, retrouver ces personnages qui m’avaient fait sourire et pleurer. Est-ce que cette deuxième lecture a confirmé mon coup de cœur d’origine ?

Oui, mille fois oui ! Cette histoire, une fois de plus, m’a touchée par la description d’une société ségrégationniste qui permet à Hilly, une jeune femme qu'on aimerait ne pas connaître,  de rassembler des fonds pour ces pauvres Africains qui meurent de faim, tout en expliquant partout à qui veut l’entendre qu’on doit installer des toilettes à part pour les bonnes noires, car tout le monde sait que les noirs véhiculent des maladies… Sans parler de cette société blanche très comme il faut qui rejette le moindre faux pas, surtout si ce pas appartient à une Célia Foote qui  a eu l’audace d’épouser l’ex de Hilly…

Mais ce qui m’a le plus touchée, ce sont ces domestiques noires qui partagent la vie de ces familles blanches, cuisinent, lavent, rangent, habillent, coiffent, élèvent leurs enfants, les consolent et les aiment sans que, jamais, il ne vienne à l’esprit de ces familles de les en remercier. Elles font partie du paysage et doivent rester à leur place. C’est ce que fait Aibileen depuis des années, venir chaque jour dans la maison de blancs pour s’occuper de leurs enfants : au début du roman, elle s’occupe de Mae Mobley, une petite fille de deux ans, c’est le 18ème enfant dont elle s’occupe. Elle en a vu des bébés, elle les a aimés et ce qu’elle ressent pour Mae c’est de l’amour, un amour maternel que la propre mère de Mae est incapable de lui donner. S’il fallait un mot pour désigner Aibileen, ce serait la « dignité » : face à l’humiliation, la souffrance, la perte de son unique fils, elle est là, digne. Et le « couple » qu’elle forme avec Minny, son amie, est formidable. Autant Aibileen se tait, autant Minny sa fâche, crie sa colère et l’injustice ressentie chaque jour. Aussi, quand elles sont entraînées par Skeeter dans l’écriture de ce livre sur les bonnes de Jackson, on a peur pour elles, peur que leurs patronnes devinent qui a dit quoi, tout en riant sous cape en découvrant « la chose abominable » commise par Minny.
Ce roman est un hommage formidable à toutes ces femmes qui ont servi dans l’ombre ces familles blanches, mais c’est aussi un hommage à toutes les femmes en général. Je ne sais pas si vous avez fait attention mais les quelques hommes qui traversent le roman brillent par leur fadeur, leur faiblesse et je ne parle même pas du fiancé de Skeeter… C’est donc un roman à lire et à relire !

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